SCPI à l’IS : quels changements pour l’investisseur ?
L'investissement en SCPI (Société Civile de Placement Immobilier) est, dans l'esprit de l'épargnant, naturellement associé à l'Impôt sur le Revenu (IR), notamment via la déclaration des revenus fonciers. Cette association est juste dans l'immense majorité des cas, car la SCPI est historiquement une société civile, régie par le principe de la transparence fiscale. Pourtant, il existe des situations, bien que rares et spécifiques, où une SCPI peut basculer ou être volontairement soumise à l'Impôt sur les Sociétés (IS). Ce changement de régime fiscal modifie radicalement la nature des revenus distribués et, par conséquent, les obligations déclaratives et la charge fiscale de l'investisseur.
Le principe général : SCPI soumise à l'IR ou à l'IS ?
Le statut fiscal d'une SCPI est déterminé par sa nature juridique et l'activité qu'elle exerce. Le choix du régime (IR ou IS) n'est pas anodin, car il définit la manière dont les bénéfices de la société seront taxés avant d'arriver dans la poche de l'associé.
La SCPI de rendement classique : l'imposition par transparence à l'IR
Par défaut, et conformément à son objet civil, la SCPI de rendement est une société de personnes soumise au régime de la transparence fiscale à l'IR. Voici ses particularités :
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Absence d'imposition au niveau de la SCPI : la SCPI elle-même ne paie pas d'impôt sur les bénéfices locatifs.
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Imposition de l'associé : chaque investisseur est directement imposé sur sa quote-part des revenus fonciers réalisés par la société, qu'ils soient distribués ou mis en réserve. Ces revenus sont imposés à la TMI (Tranche Marginale d'Imposition) de l'associé, majorée des prélèvements sociaux (17,2 %), dans la catégorie des revenus fonciers.
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Simplicité du traitement : l'investisseur bénéficie alors du choix entre le régime réel (déduction des charges) et le micro-foncier (abattement de 30 % sous conditions), ce qui offre une marge d'optimisation fiscale, notamment en cas d'achat à crédit.
C'est ce modèle, stable et bien compris, qui fait le succès des SCPI en France.
Les cas rares et spécifiques des SCPI soumises à l'IS
Une SCPI ne bascule à l'IS que dans des circonstances bien précises, qui dérogent à son objet civil et à la réglementation de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF). Ces cas sont minoritaires et la société de gestion veille généralement à les éviter.
L'incidence de l'activité commerciale (location meublée)
La loi fiscale française considère la location meublée comme une activité de nature commerciale (BIC - Bénéfices Industriels et Commerciaux). Si une SCPI exerce de manière prépondérante une activité commerciale, elle perd automatiquement son statut de société civile transparente pour devenir une société soumise à l'IS.
Le basculement intervient si l'activité commerciale (location meublée, par exemple) est exercée de manière habituelle et si elle dépasse un certain seuil par rapport aux recettes totales de la SCPI (souvent interprété comme ne devant pas excéder 10 % du total des recettes). Les SCPI qui détiennent des murs de cliniques, hôtels ou résidences gérées font très attention à la rédaction des baux (notamment à l'absence de fourniture de services) pour que les revenus restent qualifiés de revenus fonciers civils.
Conséquences de l'option volontaire pour l'IS (exceptionnel)
Bien que possible, il est extrêmement rare qu'une SCPI opte volontairement pour l'IS pour l'ensemble de ses actifs. En effet, cela impliquerait de renoncer à la transparence fiscale et aux avantages de l'IR pour ses associés (déficit foncier, déductibilité des intérêts d'emprunt personnels). Voici ce qu'il faut retenir dans ce contexte :
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Objet du changement : si une SCPI souhaite modifier son activité pour inclure une part significative de gestion hôtelière ou de services connexes à la location, l'option pour l'IS peut être envisagée, mais cela nécessite une modification statutaire et l'accord des associés.
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Conséquence immédiate : dès lors que la SCPI est soumise à l'IS, elle paie elle-même l'impôt sur ses bénéfices au taux en vigueur, ce qui change totalement la nature et le montant des revenus qui seront distribués aux investisseurs.
Les conséquences fiscales pour l'investisseur d'une SCPI à l'IS
Le passage au régime IS induit un changement fondamental dans le traitement des revenus pour l'associé : on passe d'une imposition sur des revenus fonciers à une imposition sur des dividendes.
Nature des revenus distribués : des dividendes et non des revenus fonciers
Sous le régime IS, les revenus distribués par la SCPI aux investisseurs ne sont plus des revenus fonciers. Ils sont considérés, sur le plan fiscal, comme des dividendes, c'est-à-dire des revenus mobiliers issus de la distribution des bénéfices par une société soumise à l'IS. Ces dividendes proviennent de revenus ayant déjà été imposés une première fois au taux de l'IS au niveau de la SCPI. Suite à cela, l'investisseur perd la possibilité d'utiliser les mécanismes d'optimisation liés au régime foncier, notamment la déduction des intérêts d'emprunt personnels et la création de déficit foncier. C'est cette perte de déductibilité qui rend la SCPI à l'IS moins attractive pour les investisseurs qui financent leurs parts à crédit.
Imposition des dividendes : PFU (Flat Tax) ou Barème Progressif
Les dividendes distribués par la SCPI à l'IS sont soumis à la fiscalité classique des revenus mobiliers. L'investisseur a le choix entre deux modes d'imposition.
Le taux forfaitaire de 30 % (PFU) et l'option pour le barème
On y trouve :
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Le Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU), ou "Flat Tax". C'est le régime par défaut. Le taux est de 30 % et se décompose en :
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12,8 % au titre de l'Impôt sur le Revenu (IR) ;
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17,2 % au titre des Prélèvements Sociaux (PS).
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L'Option pour le Barème Progressif (IR) :
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L'investisseur peut choisir d'intégrer les dividendes à son revenu global, qui sera alors soumis au barème progressif de l'IR.
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S'il fait ce choix, il bénéficie de l'abattement de 40 % sur les dividendes pour le calcul de l'IR (mais les prélèvements sociaux de 17,2 % restent dus sur 100 % du montant).
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Cette option est avantageuse uniquement si l'investisseur a une TMI faible (11 % ou 0 %), car après abattement, le taux d'imposition effectif peut être inférieur à 12,8 %.
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Traitement des prélèvements sociaux (PS)
Que l'investisseur choisisse le PFU ou l'option pour le barème progressif, les Prélèvements Sociaux (PS) de 17,2 % sont appliqués sur le montant brut des dividendes distribués. Ce choix entraîne le double imposition des PS. C'est un point de friction. Contrairement aux revenus fonciers étrangers qui peuvent être exonérés de PS en France, la SCPI à l'IS distribue des revenus de source française. L'investisseur subit donc une imposition sur les bénéfices au taux de l'IS (incluant des charges fiscales), puis une imposition de 17,2 % de PS sur la somme distribuée. Et qu'en est-il du prélèvement à la source ? C'est simple. En général, un acompte est prélevé à la source sur le dividende (appelé prélèvement non libératoire) et est régularisé l'année suivante.
Avantages et inconvénients de la fiscalité IS pour l'épargnant
Si la SCPI à l'IS est rare, c'est que ses avantages pour l'investisseur individuel sont généralement éclipsés par l'inconvénient majeur de la double imposition.
Les bénéfices de l'IS : un taux fixe et l'amortissement immobilier
L'avantage principal de l'IS se situe au niveau de la société et peut bénéficier indirectement à l'investisseur la stabilité du taux et l'amortissement immobileir.
Stabilité du taux
Le taux de l'IS est fixe (ou bénéficie d'un taux réduit sur la première tranche de bénéfice), indépendamment de la TMI de l'associé. Pour les investisseurs ayant une TMI très élevée (41 % ou 45 %), le régime IS au niveau de la société peut temporairement s'avérer moins lourd que l'IR.
Amortissement immobilier
La SCPI à l'IS peut déduire l'amortissement de ses immeubles (charge non déductible en IR). Cette déduction réduit le bénéfice imposable de la SCPI et, par conséquent, l'impôt qu'elle paie. Le bénéfice ainsi "protégé" par l'amortissement peut être conservé et réinvesti dans le patrimoine immobilier de la SCPI.
Les inconvénients majeurs : la double imposition des bénéfices
L'inconvénient est de taille et pèse lourdement sur le rendement net : la double imposition.
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Niveau 1 : paiement de l'IS par la SCPI (environ 25 % du bénéfice ou moins pour le taux réduit).
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Niveau 2 : paiement du PFU à 30 % (ou IR + PS) par l'associé sur les sommes distribuées (les dividendes).
La combinaison des deux impositions aboutit à un taux effectif global qui peut largement dépasser le taux global (IR + PS) d'une SCPI classique à l'IR. La double imposition fait chuter le rendement net final, ce qui explique pourquoi les SCPI choisissent massivement le régime IR.
Incidence sur la transmission et la plus-value de cession des parts
La fiscalité de la SCPI à l'IS a également un impact sur les événements patrimoniaux importants dont la plus-value de cession et la transmission.
Plus-value de cession
La plus-value réalisée par l'associé lors de la vente de ses parts de SCPI à l'IS est traitée comme une plus-value sur valeurs mobilières. Elle est soumise au PFU à 30 % (ou au barème progressif). Elle ne bénéficie pas du régime des plus-values immobilières (qui offre des abattements pour durée de détention et une exonération totale après 30 ans). C'est un désavantage majeur en cas de détention longue.
Transmission
Pour la transmission à titre gratuit (donation ou succession), les parts sont soumises aux droits de mutation après application des abattements légaux.
Comment déclarer les revenus d'une SCPI à l'IS ?
La déclaration des revenus d'une SCPI à l'IS est plus simple que celle d'une SCPI à l'IR (car elle n'implique pas le formulaire 2044), mais elle doit être réalisée avec rigueur.
Les documents à utiliser : l'Imprimé Fiscal Unique (IFU)
Le document de référence est l'Imprimé Fiscal Unique (IFU). Le rôle de l'IFU ? La SCPI à l'IS (ou son intermédiaire financier) vous envoie cet IFU chaque année. Ce document récapitule le montant brut des dividendes distribués (après paiement de l'IS par la société) et le montant des prélèvements déjà effectués à la source (notamment le prélèvement non libératoire de 12,8 %). L'IFU est essentiel car il contient toutes les informations pré-calculées pour l'administration fiscale, ce qui facilite grandement le pré-remplissage de votre déclaration.
Les cases à renseigner sur la déclaration 2042
Les revenus d'une SCPI à l'IS sont à reporter dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur la déclaration 2042 (principale).
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Revenus brut : les montants bruts des dividendes (avant déduction du prélèvement forfaitaire à la source) doivent être reportés.
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Crédits d'impôt et prélèvements : vous devez vérifier que les cases relatives aux prélèvements déjà effectués (crédits d'impôt) sont correctement remplies.
Si vous optez pour le PFU (régime par défaut), la déclaration est relativement automatisée. Si vous optez pour le barème progressif, vous devez cocher la case correspondante pour bénéficier de l'abattement de 40 %.
Comparaison rapide : SCPI à l'IR vs SCPI à l'IS
Pour synthétiser l'analyse, voici les points clés qui doivent guider votre réflexion :
| Caractéristique | SCPI à l'IR (Régime commun) | SCPI à l'IS (Régime atypique) |
| Imposition Société (Niveau 1) | Aucune (transparence fiscale). | Impôt sur les Sociétés (IS) payé par la SCPI. |
| Nature du Revenu Associé | Revenus Fonciers (ou Mobiliers/Plus-values immo). | Dividendes (Revenus Mobiliers). |
| Imposition Associé (Niveau 2) | TMI + 17,2 % (PS) sur les revenus fonciers. | PFU 30 % (ou IR + PS) sur les dividendes. |
| Déduction Intérêts d'Emprunt | Oui, déductibles du revenu foncier personnel (Régime Réel). | Non déductibles du revenu de l'associé. |
| Amortissement | Non déductible. | Oui, déductible au niveau de la SCPI. |
| Plus-value de Cession | Plus-value Immobilière (abattement durée détention). | Plus-value Mobilière (PFU 30 %). |
La SCPI à l'IS est une solution à étudier avec prudence. Si elle offre un avantage de gestion à la société (amortissement, taux fixe), elle impose à l'associé le fardeau de la double imposition et lui fait perdre les puissants leviers fiscaux du régime foncier, notamment la déduction des intérêts d'emprunt personnels. Votre conseiller en gestion de patrimoine vous orientera toujours vers le régime le plus adapté à votre Tranche Marginale d'Imposition et à vos objectifs de rendement net.
Faut-il investir dans une SCPI à l'IS ? Les clés pour décider
La fiscalité des SCPI à l'IS est un régime particulier qui, bien qu'offrant des avantages pour la société de gestion, peut engendrer des inconvénients notables pour l'investisseur, notamment la double imposition et la perte des mécanismes fiscaux liés à l'IR. Il est crucial de bien comprendre ces implications avant de se lancer, car la SCPI à l'IS n'est pas nécessairement la solution optimale pour tous les investisseurs, surtout ceux qui bénéficient des avantages fiscaux du régime foncier classique.
Avant de prendre une décision, consultez un expert en gestion de patrimoine pour déterminer quel régime fiscal est le plus adapté à vos objectifs d'investissement. Profitez de notre accompagnement personnalisé pour optimiser vos choix fiscaux et maximiser la rentabilité de votre investissement immobilier. Contactez-nous dès aujourd'hui pour une consultation gratuite !
FAQ : 1. Quelles sont les différences entre une SCPI à l'IR et une SCPI à l'IS ?
Les SCPI à l'IR bénéficient de la transparence fiscale, ce qui signifie que les revenus fonciers sont directement imposés chez l'investisseur. Les SCPI à l'IS, quant à elles, paient l'impôt sur leurs bénéfices avant de distribuer des dividendes, ce qui entraîne une double imposition pour l'investisseur.
2. Est-il possible de revenir à un régime IR après avoir opté pour l'IS ?
Non, une fois qu'une SCPI a choisi d'opter pour l'IS, il est très difficile de revenir au régime IR. Le changement de régime nécessite une procédure complexe et un accord des associés, ce qui rend cette option irréversible dans la plupart des cas.
3. Quels sont les avantages pour la société de gestion d'une SCPI à l'IS ?
Le principal avantage pour la société de gestion d'opter pour l'IS est la possibilité de déduire l'amortissement de ses biens immobiliers, réduisant ainsi son bénéfice imposable. Cela permet de mieux gérer les rendements de la SCPI et de financer davantage de projets immobiliers.
4. Les SCPI à l'IS sont-elles adaptées aux petits investisseurs ?
Les SCPI à l'IS sont généralement moins adaptées aux petits investisseurs, en particulier ceux qui financent leur investissement à crédit. La double imposition et la perte de certains avantages fiscaux peuvent réduire la rentabilité, rendant ce type de SCPI plus adapté à des investisseurs ayant une tranche marginale d'imposition élevée.
5. Quels sont les impacts de la fiscalité SCPI à l'IS sur la transmission des parts ?
La transmission des parts d'une SCPI à l'IS est soumise aux droits de mutation, contrairement aux SCPI à l'IR qui bénéficient de régimes d'abattement sur les plus-values immobilières. Cela peut augmenter la fiscalité lors de la donation ou de la succession des parts.
6. Les dividendes d'une SCPI à l'IS sont-ils soumis à des prélèvements supplémentaires ?
Oui, les dividendes distribués par une SCPI à l'IS sont soumis à une double imposition : d'abord au niveau de la SCPI via l’IS, puis à l’impôt sur le revenu ou au prélèvement forfaitaire unique (PFU) pour l’investisseur.
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